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Notre critique de Le mariage de Figaro ou la folle journée

En 1780, Beaumarchais remet en scène les principaux personnages de sa pièce Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775).
On y retrouve donc la suite des aventures du barbier Figaro, du comte Almaviva et Rosine, appelée maintenant la Comtesse.
Devenu serviteur du Comte, Figaro veut se marier avec Suzanne.
Mais son maître, un peu lassé des joies conjugales poursuit la jolie fiancée de ses assiduités et aimerait bien profiter du droit de cuissage qu’il a lui-même aboli lors de son mariage.
Imbroglios, quiproquos, chassés-croisés et jalousies en perspective …

Beaumarchais signe ici une pièce satirique qui s’en prend à la justice et aux privilèges absolus de la noblesse, au harcèlement sexuel,  aux règles injustes de la naissance qui prévaut toujours sur la qualité de l’homme et à la condition inférieure des femmes, toujours assimilées à des enfants sauf pour les punitions quand elles ont fauté.
Jugée à l’époque immorale et trop revendicatrice, elle a été censurée, interdite et a même valu à son auteur quelques mois de prison.
Certains y ont même vu, a posteriori, un des déclencheurs de la Révolution française.
Beaumarchais  qualifie son œuvre de badinage innocent et léger et pourtant à bien l’écouter l’on perçoit très vite son actualité criante et la pertinence de son propos qui en fait encore maintenant un texte original, un véritable pamphlet politique.

Loin des salons cossus et soigneusement meublés de l’époque, le scénographe Vincent Lemaire et le metteur en scène Michel Kacenelenbogen ont opté pour un espace vide, ouvert à tous les yeux.
Pas de murs, pas de parois opaques, mais des tréteaux, des tubes de fer et un montage digne des échafaudages qui garnissent certaines façades.
Une petite déception donc quand on s’attend à retrouver faste et falbalas, mais dont on perçoit vite les avantages et la prolongation de l’esprit presque impertinent et insolent de l’écrivain.
Les tourments des grands deviennent visibles (et risibles) de tous, plus de secrets d’alcôves, tous observent et n’en pensent pas moins, même si la position de chacun est respectée, devant de la scène pour les grands et les combles pour les autres.
Les moins avantagés sont peut-être les comédiens obligés de gravir, de grimper, de crapahuter de s’accrocher aux tubes comme de vrais singes et ce, la plupart du temps, dans la pénombre.
Peu d’accessoires donc pour ponctuer les changements de décor entre les cinq actes de la pièce, mais surtout des jeux de lumière (Gaëtan van den Berg) pour ponctuer la pénombre d’un lieu ou la clarté insolente du soleil sévillan.
Les costumes veulent renforcer cette impression d’intemporalité et couvrent toutes les époques entre robe à crinoline, frac, faux-cul, robe mini  et bottines militaires dans un ensemble qui ne choque guère l’œil (sauf le changement de robe entre Suzanne et La Comtesse ou la modification du modèle est très remarquable).
Avec de tels choix scéniques, Michel Kacenelenbogen montre clairement qu’il met le texte en avant, qu’il va, avec beaucoup d’inventivité et de simplicité,  sobrement à l’essentiel  et c’en est un régal pour les oreilles.
Son choix d’acteurs est, dans l’ensemble judicieux et permet à Benoît Verhaert (Figaro) de prouver (une fois de plus) qu’il est une de nos valeurs sûres (époustouflant dans la longue tirade du Ve acte), Olivier Massart (Le Comte Almaviva) lui donne la réplique avec le même brio. Mathilde Schennen (Suzanne) charmante, piquante se révèle plus que prometteuse (surtout après sa reprise au pied levé de Papiers D’Arménie)
Simon Wauters (Chérubin) est plaisant en amoureux éperdu de tous les jupons qui passent à sa portée et acrobate dans ses sauts et autres cabrioles.
Sans oublier Patricia Ide (lunaire La Comtesse), Anne-Marie Cappeliez (Marceline) en amoureuse éconduite coincée et mère tendre, Guy Pion (Bartholo) délicieux médecin bougon en diable, François Sikivie (Bazile), Alexandre Von Sivers (Brid’Oison) inénarrable avec sa courte robe de juge et son bégayement savoureux, … (la liste est longue, plus de 30 comédiens professionnels ou amateurs sur scène).
Louons encore l’imagination qui transforme la scène de nuit des jardins en un défilé d’ombres aux visages éclairés (des lampes-torches), presque sublimés par cette lumière indirecte, qui révèle les contours des visages et les transforment en masque, juste comme pour renforcer l’impression de rencontres secrètes et de confidences intimes.
Si l’on distingue parfois mal, les voix sont reconnaissables et le propos suffisant pour pouvoir en savourer toute la beauté visuelle et le burlesque des situations.

Si quasi trois heures de représentation (entracte compris) peuvent faire peur, il est bon de se rassurer en se rappelant que la première représentation de la pièce de Beaumarchais a duré près de cinq heures.
Et si parfois on a un peu l’impression de se perdre dans les méandres tortueux du récit, on se délecte toujours des mots de Beaumarchais et cela vaut bien toutes les compensations.

En guise d’aperçu (ou de rappel)  et de conclusion, quoi de mieux que de rendre la parole à l’auteur pour vous donner envie vous aussi de vous plonger (ou replonger) dans un classique savoureux 

Ne pouvant avilir l'esprit, on se venge en le maltraitant.

Feindre d’ignorer ce qu’on sait, de savoir tout ce que l’on ignore… voilà toute la politique.

Ambitieux par vanité, laborieux par nécessité, mais paresseux… Avec délices !

Dans le vaste champ de l’intrigue, il faut savoir tout cultiver, jusqu’à la vanité d’un sot.


Muriel Hublet
Spectacle vu le 13-05-2008
Théâtre Le Public
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Présentation du spectacle :
Résumé :
Le mariage de Figaro ou la folle journéetitre>Figaro, serviteur du Comte Almaviva, veut épouser Suzanne, première camériste de la Comtesse.
Mais : le Comte souhaite voir Suzanne succomber à ses charmes, Marceline veut épouser Figaro, la Comtesse veut récupérer son époux qui la néglige, et Chérubin aime la Comtesse, mais aussi Suzanne, mais aussi Fanchette... Ah ! Femmes, femmes, femmes...
Manigances, mensonges et tromperies ; privilèges des nantis, condition de la femme, dictature de l'apparence... il y a tout cela dans ce mariage.
Mais il y a surtout l'humeur et la liberté de l'auteur qui, au cœur des Lumières, ouvrait portes et fenêtres, faisait sauter les verrous de la bienséance et laissait pénétrer les idées nouvelles...
L'affiche :
de Beaumarchais
Une troupe de 30 comédiens dont Benoît Verhaert (Figaro), Mathilde Schennen (Suzanne), Olivier Massart (Le Comte Almaviva), Patricia Ide (La Comtesse), Anne-Marie Cappeliez (Marceline), Pierre Geranio (Antonio), Marie-Astrid Legrand (Paysanne), Sébastien Marchetti (Paysan), Guy Pion (Bartholo), François Sikivie (Bazile), Alexandre Von Sivers (Brid’Oison), Simon Wauters (Chérubin), …
Mise en scène : Michel Kacenelenbogen

Les prochaines représentations :

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