Myrtle Gordon, comédienne de théâtre, se retrouve enfermée dans un personnage de composition, qui la place face à sa triste réalité.
Nous sommes au début de la création de la pièce, lors des représentations de rodage (une technique typiquement américaine), à quelques jours de la grande première sur Broadway.
Faire son propre bilan n’est jamais facile, voire particulièrement douloureux. Endosser le rôle d’une femme vieillissante, sans enfants, alcoolique, profondément solitaire, incapable d’analyser ses sentiments et ses besoins est une forme de brûlure qui va se marquer au fer chaud dans la chair de l’actrice.
La mort sous ses yeux d’une de ses jeunes fans, l’indifférence et l’incompréhension de son entourage serviront de comburant à cet embrasement… dévastateur ?
Freddy Sicx porte à la scène et adapte (avec l’aide de Xavier Mailleux) le film Opening Night de John Cassavetes.
Un sacré pari, avouons-le.
Au cinéma, l’ensemble n’est que tension et lente évolution psychologie, de plus, la technique autorise, entre autres, les changements de lieux ou les gros plans.
Le premier écueil à franchir, faire comprendre d’emblée la complexité de la situation est contourné par une présentation off pour détailler de manière originale le qui que quoi donc où.
Pour le second, la scénographie discrètement inventive de Renata Gorka nous permet d’être au théâtre dans un théâtre, en coulisse, dans un motel ou sur la route et les créations vidéo de Sébastien Fernandez créent brillamment illusions et impressions.
Tout s’articule autour du personnage pivot interprété par Michèle Caucheteux (également à l’origine de cette création), de sa lutte intérieure derrière les fards, par-delà le miroir, au-delà du paraître, à la recherche d’une réponse à l’angoissant Qui suis-je ?
Paumée, entourée par une farandole endiablée de sans… enfant, avenir, projet, demain, elle va perdre pied et tout repère (ce qui nous vaudra une jouissive scène de pétage de plombs).
Fragile, émouvante, perdue, Michèle Caucheteux passe avec brio par tous les registres pour nous faire percevoir le drame intime que vit Myrtle.
À ses côtés, ses camarades de théâtre paraissent bien creux et incapables de l’aider ou de la comprendre. Chacun vit enfermé dans ses propres contingences, son égoïsme.
Attendrissant, délicieusement malmené par les uns et les autres, Marc De Roy (Maurice et Marty) tente de résister en tant qu’homme et comédien à la tornade qui vient bouleverser sa tranquillité pépère, celle en tout cas qu’il semble souhaiter même si elle ne lui apporte que désillusions ?
Louise Rocco est l’auteure de la pièce, aussi stricte que son élégant tailleur gris, elle ne peut accepter la moindre remise en question de son texte.
Luc Van Grunderbeeck, le metteur en scène, est un être pitoyable et qui ne sait plus que manier la brosse à reluire dans tous les sens possibles, prêt à tout sacrifier, même probablement sa jeune compagne la piquante Stéphanie Van Vyve.
Si se pencher sur la vieillesse, sur ses rides, sa solitude et sa déchéance n’a de prime abord rien de réjouissant, Opening Night est aussi une ode à la vie, à l’espoir et à l’amour, superbement servie par l’interprétation sensible de Michèle Caucheteux entourée avec brio par les autres interprètes.
Muriel Hublet
Spectacle vu le 02-05-2013
La Vénerie
Présentation du spectacle :
Résumé : Adulée de tous, l'actrice Myrtle Gordon est la vedette de la pièce "The second woman",
écrite par Sarah Goode. Son rôle de femme éperdue, angoissée par son âge la
révulse
L'affiche :
d'après John Cassavetes
Avec : Michèle Caucheteux, Marc De Roy, Louise Rocco, Luc Van Grunderbeeck, Stéphanie Van Vyve
Mise en scène : Freddy Sicx assisté de Sebastian Moradiellos
Myrtle Gordon, comédienne de théâtre, se retrouve enfermée dans un personnage de composition, qui la place face à sa triste réalité.
Adulée de tous, l'actrice Myrtle Gordon est la vedette de la pièce "The second woman",
écrite par Sarah Goode. Son rôle de femme éperdue, angoissée par son âge la
révulse
