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Notre critique de Mon Petit Soldat

Maladie d’amour implacable pour famille abjecte
Mon Petit Soldat Un texte écrit par une jeune fille de 19 ans (Polly Stenham), une histoire où l’on peut à coup sûr déceler quelques notes autobiographiques dans ce récit qui, une fois n’est pas coutume, ne nous parlera pas de jeunesse dévoyée, de junkies, de tagueurs, de violeurs ou de petites frappes.
Au contraire, elle préfère lucidement balayer, d’une main rageuse, les clichés rose bonbon que l’on nous sert trop souvent (pour s’acheter une bonne conscience aveugle ?) sur les familles décomposées, recollées, accolées ou artificielles.

Présenté comme une pièce basée sur la violence, les premières minutes de Mon petit soldat vont clairement en décevoir plus d’un.
Deux gamines en torturent une troisième.
C’est pas gentil de faire ça ! C’est très vilain même ! Mais si cela se révèle mièvre,  difficile d’y croire et de ne pas s’inquiéter pour la suite de la représentation.
Izzy (Deborah Amsens) sensée être le bourreau semble presque nunuche et convainc bien peu (jeu de l’actrice ou impact de la traduction française insuffisamment affinée et forte de Marianne Groves ?).
Heureusement, ce prélude, ce vague ersatz des infos de nos journaux quotidiens s’oublie très vite.Mon Petit Soldat
L’intrigue nous entraîne dans le sinistre quotidien tourmenté d’une famille pas si inhabituelle que l’on se plaît à se l’imaginer.
Loin d’une descente vers les classes miséreuses, Polly Stenham nous décrit une bourgeoisie fortunée.
Une femme délaissée au profit d’une exotique asiatique, une dépressive qui console sa solitude avec la dive bouteille et les médicaments, un père au loin qui croit remplir ses devoirs à coup de chèques, sans même prendre la moindre nouvelle, une gamine négligée et rejetée par tous qui fini par perdre tout repère et un fils empreint d’un sentiment d’amour incommensurable et presque inapproprié pour sa mère, prêt à tout pour tenter de la guérir.
La pièce se déroule sur deux niveaux, (judicieusement représentés sur scène grâce à une estrade dans le décor d’Antoine Ranson), l’extérieur, la vie, la lumière s’opposent au glauque d’une chambre désordonnée, d’un lieu clos, refermé sur sa détresse et ses secrets.
Derrière le texte subtil, puissant, ravageur, lucide et sans guère d’exagération (juste assez pour mieux frapper les esprits), l’émotion vous écrase.
Les acteurs vous envoient en plein visage (That Face est d’ailleurs le titre anglais de ce spectacle), une kyrielle de sentiments qui vous colle à votre siège plus sûrement qu’une rude volée de bois vert.
Tanya Lopert, la metteuse en scène dirige ses comédiens de main de maître et ainsi insuffle aux mots toute la vie, la force et les effets d’un uppercut.
Elle fait de Marie-Line Lefebvre (superbe et fascinante) une marâtre bourrée du soir au matin, impudique, cruelle, quasi incestueuse, manipulatrice, jalouse, revancharde, tricheuse, maître chanteur.
Une rageuse malheureuse, une frustrée revendicatrice, une blessée de l’âme qui lance des Je suis encore ta mère comme autant de SOS aussi pathétiques et pleins de détresse que ceux d’un Titanic qui revit jour après jour son terrible naufrage ; une autodestructrice impitoyable qui par son comportement n’a laissé que ruines et cendres amères dans le cœur et la vie de ses deux enfants, joués par de jeunes comédiens méconnus sur nos scènes.Mon Petit Soldat
Leurs prestations réciproques sont le gage certain de les retrouver très bientôt dans d’autres rôles aussi vibrants et déchirants.
Anaël Snoek a la grâce éthérée d’une Mia, fragile oisillon, qui se cherche un nid, qui, à force de voleter en vain à la recherche d’une bride d’attention, de l’ombre d’un sentiment, a perdu son sens du bien et du mal.
Laurent Micheli est l’adolescent généreux, le vaillant petit soldat qui a plaqué avenir et école pour combattre les démons de sa mère. 
Derrière sa rutilante armure de chevalier se cache un cœur déchiré, tiraillé à l’extrême, abusé par un amour excessif, jaloux et envahissant, qui lui impose une vie de reclus, qui glisse sur les épaules de son fils le poids de multiples rôles : enfant, confident, garde-fou, jouet anti-solitude.

Si les scènes se déroulent une à une, presque posément, pour mieux présenter cette famille infernale, les dernières minutes, celles de la confrontation des parents démissionnaires (dont l’excellent Frédéric Lepers) et en présence de leur malheureuse progéniture va éclater telle une tornade dévastatrice.
Elle blessera à l’envi innocents et bourreaux, chacun portant sa lourde croix et fustigeant violemment les autres de sa couronne d’épines.
Pour projeter l’image finale d’enfants victimes, éperdus, écrasés, pulvérisés même, par le rouleau compresseur qui sert d’ego à deux d’adultes monstrueux.

Une intense tragédie humaine.
Un drame de l’amour, de l’absence et de la négligence.
Un tsunami dévastateur qui noiera sous un flot de sentiments les bonnes consciences et les esprits bien-pensants.

Muriel Hublet
Spectacle vu le 15-08-2008
Festival Royal de Théâtre de Spa
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Présentation du spectacle :
Résumé :
Mon Petit Soldattitre>Mia a quinze ans. Issue d’une famille décomposée, elle « manque de repères » comme on dit aujourd’hui.
L’environnement familial de Mia n’est pas rose : son père a refait sa vie à l’étranger, son frère, le « petit soldat », a arrêté l’école pour se consacrer à sa mère instable, alcoolique et dépressive, avec laquelle il entretient une relation malsaine.
L'affiche :
De : Polly Stenham
Texte français : Marianne Groves
Avec Deborah Amsens, Emilie Hermans, Marie-Line Lefebvre, Frédéric Lepers, Laurent Micheli, Anaël Snoek
Mise en scène : Tanya Lopert

Les prochaines représentations :

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