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Ondine (Démontée)
Démontée ou presque …
Ondine (Démontée) L’Ondine de Giraudoux plonge ses racines dans les contes anciens.
La jeune nymphe, naïve et confiante, symbole de la nature et de la pureté tombe éperdument amoureuse de Hans un chevalier égoïste, versatile et cavaleur.
Le Roi des Ondins, avant d’autoriser son mariage, lui impose une condition non négociable : si jamais Hans la trompe, il mourra et sa propre mémoire sera irrémédiablement effacée.

Cette pièce écrite en 1939, très proche des récits qui ont bercé notre enfance, pourrait paraître anachronique au théâtre ou destinée au jeune public.
Pourtant, Jean Giraudoux y détricote le mythe pour monter en épingle les relations hommes femmes et le choc des cultures, rendant le sujet contemporain, presque universel.
Armel Roussel s’empare de ce texte pour nous en proposer une adaptation très personnelle à la fois onirique (principalement en première partie), fantaisiste, voire quasi burlesque, et revendicatrice (les considérations sur le statut de l’artiste et la place de l’Art dans la Culture instituée par la vision étroite de nos gouvernants).
Dans une mise en scène que l’on peut qualifier sans hésiter de non conventionnelle, il explose, à nouveau, allègrement les codes du ‘classique’ pour nous offrir un OTNI (Objet Théâtral Non Identifié) inclassable, bourré d’humour et totalement déjanté derrière la gravité des sujets abordés.
Interpellations du public (carrément invité sur scène), scène ouverte sur trois côtés, danse, vidéo et théâtre dans le théâtre ne sont que quelques-uns des ingrédients utilisés par Armel Roussel.

Divisée en trois lieux distincts, l’action (d’une durée de plus de deux heures trente sans entracte) est entrecoupée par deux intermèdes cocasses (le temps du changement de décor).
La première, celle de la rencontre, est plus consensuelle dans son propos et sa réalisation (mise en place des personnages oblige).
On y épinglera l’originalité d’une création sonore (Pierre-Alexandre Lampert) constituée par des bruitages life (plaque de fer pour l’orage, plastique froissé pour les crépitements du feu…) et l’esthétisme onirique d’un visuel soigneusement étudié.
Nettement plus dynamiques,  les deux autres actes, par les rebondissements et une gouaillerie persifleuse ou frondeuse, séduiront plus largement.

C’est cependant un fameux travail, le fruit d’une longue réflexion qu’est cette création d’un univers à la fois profond et délicieusement kitsch (amplifié par les tenues et comportements des comédiens).
Inévitablement devant une telle ampleur, certains choix scéniques interpelleront ou dérangeront, mais Ondine (démontée) se révèle franchement plaisant, captivant même par moments.

Ondine (Démontée) Les costumes burlesques de Coline Wauters (avec quelques tableaux où la nudité est naturelle et aisément compréhensible), gestuelle volontairement exagérée, grimages ne vont que renforcer l'interprétation des onze acteurs (Allan Bertin, Yoann Blanc, Lucile Charnier, Romain Cinter, Julien Jaillot, Amandine Laval, Vincent Minne, Sophie Sénécaut, Lode Thiery, Judith Williquet, Lise Wittamer) qui assument tous les rôles et se chargent également des multiples manipulations du décor conçu par Nathalie Borlée.
On soulignera la justesse de Sophie Sénécaut en Reine pleine de bon sens, le jeu protéiforme de Yoann Blanc, l’excellente prestation de Vincent Minne (un Hans trouble et tourmenté) et la délicieuse fragilité de l’Ondine d’Amandine Laval.

Spectacle vu le 24-02-2015
Lieu : Théâtre Les Tanneurs

Une critique signée Muriel Hublet

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