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L’Amant
L'amantEn Belgique, les statistiques donnent un divorce pour deux mariages, avec une nette prédominance de la catégorie mariés depuis 10 à 20 ans. Comment faire durer son couple ?
Telle est la question que beaucoup se posent.

En 1962, Pinter écrit L’Amant, une pièce qui explore par le noir et l’absurde des liens entre Richard et Sarah.
Ses héros sont mariés depuis dix ans.
Un couple bourgeois banal à première vue.
Pourtant, depuis plus de neuf ans, chacun  a des relations extraconjugales.
Sarah a pour amant un dénommé Max qu’elle reçoit quelques après-midi par semaine.
Richard va régulièrement voir une pute.
Chacun semble tolérer cette situation.
Mieux ils s’attachent à respecter la vie privée de l’autre.
L’honnêteté serait-elle un moyen de durer ?
Pourquoi cacher ce qui nous est nécessaire ou essentiel ?
Pourquoi taire ou refouler nos envies et nos fantasmes ?

Jouant sur les faux-semblants et le trouble des interdits, Pinter franchit encore une étape, brisant les clichés du classique triangle amoureux et l’ordre apparemment établi au sein du couple.
Richard au complet strict de comptable, devient Max, à la tenue décontractée, l’après-midi.
Le chignon serré de Sarah et ses sages mocassins disparaissent pour des hauts talons et une affriolante robe noire à l’heure du thé.
Pas de véritable tromperie (enfin sur papier), mais des relations très ambiguës où l’un comme l’autre risque de se perdre.
Que se passerait-il si jamais l’un des deux venait à se lasser de ce jeu ?

Avec Pinter rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, tout eL'amantst toujours sur le fil du rasoir.
Ses dialogues, caustiques et tendus, surfent sur la vague glauque et troublante d’une sensibilité exacerbée.


Une scénographie cosy (Simon Siegmann), des vidéos (Antoine Desvigne) et un choix de musique soigné (Brice Cannavo), pour sa mise en scène, Aurore Fattier a clairement opté l’esthétisme.
Visuellement superbe à l’œil, l’ensemble pourrait avoir tout pour séduire.
Mais sa direction d’acteurs (Delphine Bibet, François Sikivie et Pitcho Womba Konga), les menant sans cesse à la limite du surjeu est nettement plus déconcertante.
Certains de leurs mouvements paraissent presque comme des ralentis d’un mélo de série B.
Devant de telles exagérations, impossible de croire à ce couple.
Tout n’est que fausseté, mensonge et démesure irréaliste.
Dommage d’avoir fait un tel écart par rapport à l’esprit voulu par Pinter, car l’implication de Delphine Bibet et de François Sikivie tout comme la qualité intrinsèque de leur jeu méritent, elles, tous nos applaudissements.

Spectacle vu le 20-01-2015
Lieu : Théâtre Le Public - Voûtes

Une critique signée Muriel Hublet

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