
Les Pavés du Parvis
Fermez les yeux.
Serrez la main… elle tient une pinte de votre breuvage favori.
Tendez l’oreille… bruits, paroles, tintements de verre, rires…
Vous êtes attablés à un bistrot Parvis de Saint-Gilles.
Autour de vous bruisse tout un microcosme : petite vieille à cabas cabossé, clodo chargé, exilé français, réfugié politique, curé de la paroisse, apôtre de l’agriculture, névrosée intellectuelle, metteur en scène hermétique, artiste en mal de reconnaissance, assistante sociale en recherche de sa place dans la société…
Les conversations s’entrechoquent, les univers s’entrecroisent le temps d’un regard, d’un frôlement, d’un geste, d’une proximité.
Place du village dans la grande ville, le Parvis est le symbole choisi par Pierre Wayburn, Amélie Lemonnier et Philippe Laurent à la mise en scène pour nous proposer une vision de notre société.
Avec quelques chaises pour tout accessoire, ils créent une foule de personnages typés, typiques, authentiques, profonds, que l’on reconnaîtra de Liège à Arlon, de Namur à Mons, car seuls, peut-être, certaines intonations peuvent différer.
Ils glissent avec une aisance folle de l’un à l’autre, épaules plus basses, accent marseillais, torse bombé, regard exalté, yeux de chien battu…
Pierre Wayburn et Amélie Lemonnier jonglent littéralement avec les identités. C’est à une véritable performance visuelle et théâtrale qu’ils nous convient en nous faisant asseoir sur les banquettes de leur bistrot.
Spectateurs attentifs de cette mixité sociale, de ce brassage multiculturel, de cette intégration plus ou moins réussie, de ces instantanés de vie, de ces peintures humaines et universelles tout simplement.
S’il devait y avoir un bémol il serait, pourquoi diable encombrer la finesse de tels portraits, pourquoi l’alourdir, la plomber par des propos pompeusement politico-sociaux moralisateurs.
Heureusement, la prestation de Pierre Wayburn et Amélie Lemonnier est telle que l’on garde en mémoire leur maestria, l’émotion, le rire, l’humain qui se dégage des Pavés de Saint-Gilles. À tel point qu’un peu distraits, de passage du côté du Parvis, on chercherait bien à reconnaître Ahmed, le bobo ucclois etc.
Spectacle vu le 02-02-2013
Lieu :
La Samaritaine
Une critique signée
Muriel Hublet
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