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Moins deux
Moins deux  - Théâtre ProscéniumA priori, rien de drôle dans le sujet abordé par Samuel Benchetrit dans Moins deux et pourtant…
Dès son entrée dans la salle, le spectateur découvre deux hommes d’un certain âge, couchés côte à côte dans une chambre d’hôpital. Ils dorment.
Une porte blanche à double battant en fond de scène.
Partout ailleurs, du noir, rien que du noir.
Un décor sobre, efficace, laissant libre cours à l’imagination et qui sera précisé quand c’est nécessaire, tantôt par une rubalise blanche et noire sur le sol pour symboliser le bord d’une route, tantôt par un coffre d’où émergera comme par magie un divan rouge, deux sièges de salle d’attente ou, qui une fois redressé deviendra mange-debout dans un dancing ou banc le long d’un canal.
Une scénographie percutante de simplicité qui n’encombre pas les yeux pour laisser toute la place à un texte juste, authentique, tantôt drôle, tantôt grave, mais toujours au bord de l’âme.
Moins deux répond de manière surprenante à la question cent fois posée : « Que feriez-vous si on vous disait qu’il ne vous reste qu’une quinzaine de jours à vivre ? », avec la différence qu’ici ils sont deux à affronter cette annonce.
À quoi bon rester à l’hôpital ? propose Jules.
Autant profiter du temps qui reste pour aller admirer une dernière fois la campagne !
Paul se laisse convaincre et les voilà en route…
Mais faire du stop, en camisoles de malade, avec pour l’un une potence et une perfusion au bout du bras, ce n’est pas gagné d’avance !
C’est alors qu’arrive une jeune femme sur le point d’accoucher (Virgine Kevers qui incarne trois rôles à elle seule, changeant de personnage avec beaucoup de conviction et de talent).
Elle vient de se faire larguer par son compagnon qui n’arrivait pas à assumer son futur statut de père (la paternité est un sujet récurrent dans la pièce).
La balade prend dès lors un tout autre… tournant !
Désormais, les deux « mourants » vont se mettre à la recherche du futur père (Thibault Moës il apporte au trio la touche indispensable de jeunesse au masculin) qu’ils ont promis de ramener à la jeune femme.
De péripétie en péripétie, d’un appartement à une salle de bal, d’un lieu mal famé à une salle d’attente, le spectateur va découvrir par petites touches le passé de ces deux hommes, leur histoire familiale et… leurs bleus au cœur.
Le tout avec beaucoup de dignité, de retenue et d’humour.
Le duo des vieux (Denis Duculot et René Dupont), interprété avec énormément de talent et de justesse, fonctionne à merveille.
Une complicité s’installe tout en gardant une distance respectueuse.
Le rythme est posé, les respirations bien placées.
Ici, pas de cris, de hurlements ou de gesticulations. Ici, tout a du sens, même et surtout les silences et la gravité se fait d’autant plus profonde qu’elle s’allège par l’humour et une sage clairvoyance. Moments savoureux quand Jules et Paul se chamaillent comme deux jeunes coqs.
Moments émouvants quand ils se livrent à des confidences.
Paroles à épingler quand ils deviennent philosophes.
À voir pour se recentrer sur l’essentiel avec humour.

Spectacle vu le 26-10-2012
Lieu : Théâtre Proscénium

Une critique signée Carine Vrayenne

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