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L'écornifleur
L'écornifleur Henri, pique-assiette de première catégorie, se fait passer pour un poète aux yeux de Mr et Mme Vernet, un couple de naïfs bourgeois sans enfants.
Sans guère d’autre talent que l’incruste, la flagornerie et l’art d’abuser de tout, Henri a décidément tout pour plaire surtout à des incultes prêts à entrer en pâmoison à la plus vilaine des rimes et à encenser la plus ridicule et bancale strophe.
Ménagère solitaire et rêveuse, très Madame Bovary, Mme Vernet (Rosalia Cuevas) est une proie idéale pour le rusé coquin, son débonnaire et aveugle époux (Léonil Mc Cormick), une sorte de rond-de-cuir épicurien, mais doté aussi d’un solide bon sens sauf pour lui-même.

Pièce peu connue de Jules Renard, L'Ecornifleur est caustique, cruel, cinglant, mais aussi d’un réalisme cru pour passer à la moulinette notre petitesse et nos comportements plutôt bornés pour ne pas dire souvent instinctifs voire primaires.

Le spectacle repose sur la langue riche et les répliques mordantes de Jules Renard mais aussi sur l’interprétation d’Henri.
Personnage pivot, il se doit d’être malicieux, souple, virevoltant, mais comme il est aussi narrateur sous la forme d’apartés en nous contant l’évolution du récit comme ses préoccupations morales, il doit laisser transparaître fragilité et un malaise existentiel palpable.

Jules Renard voyait son héros roux, Victor Scheffer pour cette mise en scène essaye de respecter ce souhait et confie (un excellent choix) ce rôle à Thomas Delvaux.
De teinte délicate, loin du prononcé Poil de carotte, le jeune comédien nous offre une prestation à l’identique, sensible, qui joue subtilement la vulnérabilité ou la noirceur en passant par les doutes et l’ambivalence.
Scène de jalousie, regards expressifs, Rosalia Cuevas excelle dans ces pudeurs de femme amoureuse, réservée, piégée entre raison et sentiments.

Ne tardez pas à découvrir cette élégante comédie, ce texte ciselé et drôle qui n’a pas pris une ride.
C'est cinglant, plein d'humour, de vacherie et d'autodérision que l’on s’attache à cet écornifleur maladroit et à ces bourgeois gentiment naïfs.

Spectacle vu le 23-02-2013
Lieu : La Valette

Une critique signée Muriel Hublet

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