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La pitié Dangereuse
La pitié Dangereuse

À la veille de la Première Guerre mondiale, le lieutenant Hofmiller (Nicolas Pirson) est cantonné dans une petite ville de province.
Sa maigre solde, l’ennui d’un casernement sans guère de débouchés et une probable envie de luxe, de succès et de se glorifier au moins à ses propres yeux vont l’entraîner à se lier d’amitié avec une jeune notable du cru.
Edith (Stéphanie Moriau) a les jambes paralysées depuis quelques années.
Son père (Jean-Paul Dermont) a consulté les plus grands médecins européens et se raccroche au moindre espoir.
Petit à petit, le jeune homme va se retrouver enfermé dans un piège diabolique qu’il a lui-même bien involontairement activé.
Ce qui pour lui n’est que courtoises et innocentes visites à une handicapée sont pour la demoiselle une cour discrète.
Par pitié pour le père tourmenté, il parle d’un éventuel traitement qui est pris immédiatement comme une certitude.
Très vite, il est happé dans un engrenage où la vérité devient aussi destructrice que le mensonge.
Ce roman de Stefan Zweig est une sorte de dissection de la pitié, des mécanismes implacables qui nous poussent toujours plus loin dans le pseudoaltruisme, le simulacre et l’aveuglement.
L’adaptation théâtrale a expurgé les détails, ne reprenant que les sentiments, sans systématiquement fournir toutes les clés de la psychologie des personnages.
On se retrouve donc avec les frustrations, les émois, les colères d’Édith, la froideur distante et bienséante d’Hofmiller, la détresse d’un père et les tergiversations d’un médecin (Michel de Warzée).
On ne peut que ressentir un frisson glacial et dérangeant dans certaines plongées dans les pensées du petit lieutenant, dans sa confusion, dans son ego meurtri, dans sa suffisance dégoûtée.
Torturé par la culpabilité, enfermé dans une ambivalence malsaine, il n’a pas la force de dire non, de refuser de nouvelles compromissions, d’autres mensonges jusqu’à l’inéluctable…La pitié Dangereuse

Dans un élégant décor, loin des grandes envolées sentimentales, Stéphanie Moriau et tout particulièrement Nicolas Pirson nous offrent un jeu tout en finesse et intériorité tandis que Jean-Paul Dermont excelle en père prêt à se raccrocher au moindre espoir.
La mise en scène de Vincent Dujardin crée un crescendo qui interpelle, énerve, interroge et dérange notre tranquillité d’esprit.
À plus d’une reprise, un ou l’autre spectateur ne peut s’empêcher de prendre parti, d’encourager ou de plaindre l’un ou l’autre.
N’est-ce pas là pour des artistes la plus belle des récompenses, la meilleure preuve d’avoir offert au public un spectacle prenant, captivant et interpellant.

Spectacle vu le 04-03-2012
Lieu : Comédie Claude Volter

Une critique signée Muriel Hublet

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