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Garbo n'a plus le sourire
Garbo n'a plus le sourireDans la moiteur de l’été 44, Louis, la cinquantaine, vit terré derrière la cabine de projectionniste du Pathé-Palace.
Jeanne, une jeune ouvreuse d'une vingtaine d'années, force sa porte et devient son rayon de soleil, son souffle d’air frais.
Véritable feu-follet, elle déborde d’énergie frustrée par la guerre, elle est une bulle d’oxygène pour le vieux bougon.
Bien involontairement, sa joie de vivre communicative la place au centre d’un triangle amoureux.
Le directeur de l’établissement (Jean-Marc Delhausse) et un soldat de la Wehrmacht (Steve Driesen) vont eux très différemment apprécier ses relations avec Louis.
Bruxelles vit ses derniers jours sous le joug allemand, mais s’il flotte déjà comme un air de liberté, la peur, les réalités sordides de l’Occupation, les persécutions envers les juifs et les collabos plombent l’atmosphère et sont les prémices de bien des drames.

Premier texte de Vinciane Moeschler, Garbo n'a plus le sourire se révèle une histoire attachante historiquement solidement étayée.
La mise en scène de Véronique Biefnot trouve un écrin idéal dans les superbes décors de Serge Daems.
Si on apprécie son efficacité dans le jeu des acteurs, on sera plus dubitatifs face à l’option prise d’insérer des petits films tout au long de la pièce.
Ces intermèdes musicaux, très jazzy, recréent une ambiance et sont pour Louis, comme le chante Nougaro, l’écran noir de ses nuits blanches.
S'il serait injuste d'en rien critiquer la réalisation de Frédéric Gibilaro ou les performances des Swing Dealers, force est de reconnaître qu’ils rallongent inutilement le spectacle.
Les limiter à un ou deux aurait été plus judicieux.
De même, le montage kitch utilisé pour faire percevoir aux spectateurs le temps qui s’écoule, justifié pourtant par un changement de décor et intelligemment amené par une jolie pirouette scénaristique, flirte dangereusement avec l'agaçant.
Mais ce sont là de bien petits bémols pour une pièce attachante et attendrissante, qui nous replonge dans une réalité que l’on préfère occulter, qui nous interroge sur nos propres capacités à la résistance ou à la lâcheté.
Si les personnages dévolus à Jean-Marc Delhausse, Steve Driesen  paraissent peu étoffés, le duo Kacenelenbogen- Tefnin nous offre quelques superbes scènes.Garbo n'a plus le sourire
Michel Kacenelenbogen, très Michel Simon par instants, excelle en bourru aigri dont le cœur prend le pouvoir sur le ressentiment.
Sa partenaire, Claire Tefnin, se voit gratifiée d'un rôle complexe, allant de l’inconscience confiante à la profonde douleur morale, dont elle assume les multiples facettes avec de fraîcheur et de profondeur. Avec cette touchante saga,  le Théâtre royal du Parc referme cette saison théâtrale décidément particulièrement réussie en plaçant Garbo n'a plus le sourire parmi les incontournables du moment.

Spectacle vu le 01-05-2010
Lieu : Théâtre Royal du Parc

Une critique signée Muriel Hublet

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