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L'Ecole des ventriloques
Illusion d’illusion ?
L'Ecole des ventriloquesUn corps tombe sur la scène.
Quatre personnages sombres s’approchent, le regardent, le scrutent, l’inspectent et la silhouette commence à remuer lentement, à s’agiter, à bouger, mue par ces mains discrètes.
Un effet saisissant, des gestes tout à faits réalistes créés à huit mains.
Un splendide lent ballet, un travail de précision inouï.
Le ton est donné, L’école des ventriloques va nous surprendre.

Surgi, Don Crespin, qui tel un mafioso, avec l’accent naturellement, poursuit les intrus à coups de revolver.
La surprise vient là de l’aspect du bonhomme : une poupée en noir et blanc, presque grandeur nature, qui se déplace au rythme des godillots de l’actrice Emmanuelle Mathieu, qui manipule bras et tête.
Nous sommes dans une école d’un genre spécial.
Une école de ventriloquie où chaque manipulateur, chaque élève s’efface pour devenir un personnage.
Ici ce sont les créations qui sont reines, qui gouvernent, qui font les règles.
Monde étrange dont on ne sait trop qui tire les ficelles, monde fou où l’anormalité semble être la règle, où l’être humain est compacté, formaté, au profit de la marionnette dont il devient le pantin.
Endroit amoral où un génie, un héros ou un ange n’ont pas place, incapables de résister à la veulerie, au mensonge, à l’aveuglement, à la pornographie, au sexe à outrance, …
Céleste (Fabrice Rodriguez), pauvre égaré n’y comprend rien et cherche bien plus que sa voie dans ce dédale infini, dans cette réplique satirique de notre univers déboussolé.


Alejandro Jodorowsky signe un magnifique conte, une fable réaliste et cruelle.
Il interpelle, il secoue les consciences au second degré en laissant de prime abord la vue sur un univers défragmenté et tourmenté tout à fait kitch et bourré d’humour (noir).L'Ecole des ventriloques
Au premier degré, on se laissera donc emporter par le talent créatif de Natacha Belova et ses étranges lutins libidineux, le travail exigeant  de manipulations réalisé sous la houlette de Neville Tranter, la mise en scène inventive et déjantée de  Jean-Michel d’Hoop, la musique live de Pierre Jacqmin et  l’audacieuse complicité de toute une équipe (Cyril Briant, Sébastien Chollet, Anne Romain, Isabelle Wéry, Aurélie Deloche, Xavier Lauwers) pour arriver à un résultat aussi bluffant.
La qualité du propos, son originalité, peut-être un peu outrancière pour les plus prudes, ne manquera pas de séduire et qui sait de soulever la question Qui tire les fils de qui ?
Qu’on y trouve une réponse ou pas, tout le monde se délectera de ce petit bijou de fraîcheur glauque, d’ironie amère, de plaisir cynique, de cauchemar ludiques et lubrique et de provocante audace.

A ne pas manquer !

Spectacle vu le 12-02-2008
Lieu : Théâtre de la Balsamine

Une critique signée Muriel Hublet

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