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Les Muses
Dire que je suis allé voir cette pièce avec des pieds de plomb est un euphémisme.
Que voulez-vous, la seule mention de comédie musicale me donne des poussées d'urticaire, et le théâtre dit moderne a un effet assez semblable.
Difficile d'être objectif dans ces cas-là, et autant dire que j'abordais la séance avec un certain scepticisme, pour ne pas dire méfiance.

Tuons le suspense : j'ai bien aimé.
Eh oui !
Comme quoi...
Alors pour me débarrasser de la corvée, autant aborder tout de suite les deux sujets qui fâchent : l'aspect touffu de la pièce, presque incohérente par moments, et le texte des chansons.
Autant le premier s'explique lorsqu'on a lu le manifeste d'intentions de l'auteur, autant hélas, je n'ai pas d'indulgence pour le deuxième défaut.
Par moment, je me serais cru dans un concert de Sortilège, avec des textes au choix soit plombés d'un mysticisme de bas étage, soit carrément naïfs au possible.
Si la musique passe très bien la rampe -jeu de mots ?- et respecte le ton décalé de la pièce, entre rock psychédélique et glam du début des années 70, les chansons en elles-mêmes m'ont fort déçu.
 
Les acteurs sont bons, et surtout très motivés.
Certes, comme c'était une première, certains errements se sont fait sentir, mais rien de bien grave.
Leur jeu est très frais, très engagé, et les antirôles sont bien incarnés.
Mention spéciale pour le rôle du metteur en scène, dont la transformation du deuxième acte est soufflante.
La meneuse de revue, façon Moulin Rouge, vaut son pesant d'or, même si elle surcharge un rien son rôle.
Et félicitations pour le Bowie plus vrai que nature. Ziggy Stardust peut retourner sur Mars, ses Araignées continuent le travail.
 
La trame de la pièce est dense, et joue en permanence sur l'ambiguïté volontaire entre satire-fiction, comédie musicale inachevée (et pour cause, le rôle des personnages principaux étant justement de la finir !) et questionnement direct ou indirect sur la frontière séparant les personnages de leurs auteurs et l'implication de l'œuvre dans le réel, ou vice-versa.
Comme je l'ai mentionné plus haut, cet aspect est presque déstabilisant par moments, tellement les imbrications de différents niveaux de lecture se succèdent, parfois à une vitesse effarante.
Le va-et-vient entre la pièce, la réalité que décrit celle-ci et la fiction dans la fiction est intéressant, il donne tout de même un peu le mal de mer de temps à autre.
La mise en scène est originale, certains des acteurs n'hésitant pas à sortir de scène ou à prendre le public à témoin.  
Le deuxième acte quant à lui commence de façon tonitruante par une métaphore arrosée et enfumée de l'inspiration venant des Muses... ce n'est pas tous les jours que Zeus transformé en Tigrou envoie des lattes à son efféminé de fils Apollon tout en confisquant le bar à alcools qui sert de source -au propre sens du terme- à ses neuf filles !
 
Le monologue de fin transforme quant à lui radicalement le ton, et ouvre une série de perspectives intéressantes qui invitent à poursuivre la réflexion chez soi, en lisant La Part des Ténèbres de Stephen King, par exemple.
Juste que sa place me semble un peu curieuse; après l'explosion de rires qui suit l'apparition des Muses, il devient délicat de ramener le spectateur à des questions plus profondes.
 
En attendant, je vous laisse…
Major Tom plane, et Ziggy braille dans mes écouteurs.

Spectacle vu le 29-04-2009
Lieu : Atelier 210

Une critique signée Bruno Ramos

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