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Les femmes savantes
Molière entre sérénité et énormité
Les femmes savantesLa Flûte enchantée vous propose des Femmes Savantes dépoussiérées, dopées par un cocktail survitaminé d’énergie et dotées d’un équilibre qui dérive entre sérénité ridicule des arts martiaux, féminisme outrancier et pédantisme grotesque.



Molière nous avait déjà offert une satire des femmes et des dérives de leur érudition dans les Précieuses Ridicules.
Il reprend quelques années plus tard le même sujet, mais en divisant une famille entre hommes de bon sens et femmes pseudo-cultivées.
Il glisse au milieu de ce mélange détonnant Henriette, une jeune fille qui n’adhère pas aux envolées culturelles et maternelles et un jeune homme amoureux, Clitandre, ancien amoureux déconfit d’Armande la sœur aînée de la première.

Loin des classiques salons d’époque et des volumineuses tenues empesées, le metteur en scène Sébastien Berton a opté pour un décor moderne … qui situe l’action dans le kot poubelle de la demeure.
Et des sacs noirs (la touche rétro de la pièce, à moins que Sébastien Berton ne vive dans une ville où les sacs poubelles imposés ne sont pas encore obligatoires) vous en verrez des tas, ils vont s’amasser, les demoiselles de bonne famille vont s’agenouiller pour laver le sol, la maîtresse balaie.
Pourquoi des poubelles et des bouteilles vides ?
Nous n’en saurons rien, on peut juste espérer qu’elles ne représentent pas la juste place à donner à la culture.
Les femmes savantes
Les tenues vont de même, pas de dentelles ni de jupons empesés, des pantalons coupés style aïkido  et des pyjamas.
Les allusions au feng-shui et autres postulats modernes très in peuvent eux se comprendre et on y perçoit sans problème les allusions ironiques aux modes actuelles et à l’hermétisme de certaines théories très en vogue et si peu perceptibles.
Pour les pyjamas, l’explication reste peu perceptible.

Si certaines choses étonnent ou dérangent, il faut reconnaître que l’ensemble a été boosté aux amphétamines tant les scènes s’enchaînent et les confrontations verbales deviennent l’occasion de joutes physiques à coups de balai pour mimer kendo et autres combats martiaux.
Si la pièce a donc a pris en rythme et en envolées surprenantes comme une scène délirante quand Trissotin vient déclamer ses poèmes, on déplorera, par instants, que cela provoque l’avalement de certains mots.
On y notera aussi certains clins d’oeil comme de faire de Chrysale, homme faible et lâche qui cède devant sa femme un ermite drapé dans sa couverture, Trissotin transformé en un gourou de secte, Vadius en bouddhiste.

Mais derrière ces choix scénographiques et d’interprétation, parfois incompréhensibles, du metteur en scène, reste les mots de Molière qui n’ont pas pris une ride et ne sont pas, eux, à glisser dans un sac-poubelle tant derrière les alexandrins et le sujet reste pertinent.
Si Molière tourne en ridicule ses Femmes Savantes, il les dépeint aussi avec finesse et humour et leur sottise n’a d’égale que leur drôlerie.
On les retrouve donc avec plaisir et la vivacité communicative de l’équipe de comédiens n’y est pas pour peu.
Pointons donc Manuella Ammoun (Armande) comme toujours impeccable, Lionel Loth (Clitandre) convaincant et amusant dans son rôle d’homme pris entre deux femmes, le retour d’Oscar Dubru (Ariste) au regard pétillant comme à l’accoutumée, Chantal Pirotte (Bélise) déjantée et attachante, Alan Bourgeois (Trissotin) en lâche, veule et piquant gourou, sans oublier Gérard Gianviti ( Chrysale ), Jacqueline Préseau (Philaminte), Sibylle du Plessy( Henriette), Jérémie Van Hoof Vadius et le notaire) et Tania Spruch ( Martine).

Rire et détente assurés mais aussi un moyen de faire découvrir le théâtre autrement aux plus jeunes.

Spectacle vu le 08-05-2008
Lieu : Théâtre de la Flûte Enchantée

Une critique signée Muriel Hublet

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