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Le journal d’un fou
Un journal à mettre à la une
Le journal d'un fou Un homme, seul, commence à nous parler, comme soulagé d’avoir des interlocuteurs ou tout au moins des oreilles pour l’écouter.
Il va discourir, évoquer son passé, avec une certaine chronologie, mais surtout dans une description drolatique.
L’humour de son propos, ses mines étonnées, réjouies, contemplatives, adoratrices ou offusquées sont un régal pour les yeux et titillent agréablement notre intérêt pour Proprichtchine, cet humble fonctionnaire russe, employé comme tailleur de plumes et écrasé pour une hiérarchie pesante.
Il va petit à petit basculer dans l’irrationnel, perdre bribe par bribe les notions de réalité et de bienséance.
Derrière ce protrait de la naissance d’une folie se cache aussi dans le propos de Nicolas Gogol, l’auteur, une satire de la société russe de l’époque.
Le texte écrit en 1835 n’a pourtant pas pris une ride.
Le travail des textes de Frédéric Genovese et la mise en scène de Bernard Damien lui insuffle un sentiment d’intemporalité et de fraîcheur incroyable. On s’attache donc à ce diable d’homme qui sait parler chien, qui aboie au sol avec conviction ou qui se drape offusqué dans sa souveraine cape de Ferdinand II Roi d’Espagne.
Personnage fanstasque, burlesque, attendrissant, surprenant, tendre, attachant ce Proprichtchine doit beaucoup à l’interprétation de Frédéric Genovese.
Tour à tour lumineux, séduisant, paniqué, maniant les mines de chien battu ou d’enfant incompris à la perfection, il incarne littéralement l’homme qui sombre dans le délire paranoïaque.

On reprochera une seule chose à ce journal d'un fou
Trop court.
On en voudrait plus, tant on se laisse emporter dans les divagations, dans les méandres de l’esprit de cet homme tourmenté.
Sa souffrance est pourtant là, perceptible de bout en bout pour éclater à la fin en un appel vibrant, en des larmes  d’épouvante d’un homme submergé par l’effroi et la solitude.
L’amusement de la période burlesque fait place à l’effroi réaliste de constater qu’il s’en est fallu de peu pour que Proprichtchine bascule et nous met face à nous, à nos protections, à nos solides garde-fous sensés nous protéger, nous empêcher nous aussi de sombrer.
Et si demain …
Une pensée noire qui en taraudera certains, mais tous se souviendront surtout de l’excellente prestation de Frédéric Genovese.
Ce jeune comédien de 27 ans est un nom faudra décidément suivre attentivement à l’avenir.

Spectacle vu le 06-01-2008
Lieu : Théâtre de la Flûte Enchantée

Une critique signée Muriel Hublet

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