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Le Locataire
Le Locataire   Pièce des années 60, Le locataire dénonce les déviances sexuelles et la violence de la société anglaise des sixties. 
Si ces thèmes sont toujours actuels, ils ont désormais une dimension plus crue et cruelle que la version presque policée de Joe Orton.
Reprendre cette vision surannée et édulcorée, apparaît comme un anachronisme pour un théâtre réputé pour ses dénonciations virulentes et  brutales des travers de notre époque.
Ce choix se justifie pourtant pleinement.
La mise en scène de Derek Goldby et les décors volontairement excessifs et parodiques de Marcos Vinals Bassols rendent toute sa cruauté barbare et sa force dénonciatrice aux propos de Joe Orton par le détour de la parodie.Le Locataire

Surprenant et dérangeant pour un public habitué à un modernisme sobre, incisif et accusateur, le travail réalisé vaut franchement la peine de mettre ses aprioris et ses jugements à l’emporte-pièce de côté.

Côté scénographie, Marcos Vinals Bassols utilise le réalisme en recréant fidèlement un  intérieur bourgeois miteux.
En laissant les pans de mur apparents, des morceaux de papier peint décollés ou des fenêtres sans supports, il veut refléter une réalité morcelée, éclatée, décalée.
Derek Goldby amplifie encore cette impression persistance d’être comme assis entre deux chaises. Il opte volontairement pour un certain surjeu et ce drame revêt des allures vaudevillesques voir kitchissismes.
Pour arriver à ce résultat, il semble avoir plongé ses racines inspiratrices dans le cinéma, ainsi chaque personnage évoque l’image d’un comédien célèbre.

Nicole Valberg a l’apparence d’une Marilyn Monroe sur le retour. 
Elle prend  une voix de nunuche énamourée, des attitudes et des audaces de vamp décatie et pourtant elle laisse magistralement transparaître toutes les fêlures d’une femme blessée et abusée qui bien plus qu’une nouvelle jeunesse cherche un peu d’amour.
Gérard Vivane a l’aspect d’un Jack Nicholson sombre et inquiétant.
Toussaint Colombani, fourbe, manipulateur et démoniaque, se voit attifé  des allures et de la démarche d’un Travolta très Greasant, tout en affectant des mines d’angélique bambin.
Georges Satiadis devient un mafioso aux cheveux gominés, très Pacino dans son comportement de Parrain familial enfermé dans un carcan de morale bien-pensante qui tente de trouver un équilibre entre ses penchants réprouvés et cette rigide étiquette du paraître.
 
Un choix étonnant et détonnant qui fait du texte de Joe Orton, quarante ans après, un actuel petit bijou d’humour noir.
Présenté d’une manière iconoclaste, volontairement drolatique, il prend des allures d’inquiétant vLe Locataire   audeville.
Une fois n’est pas coutume, et on ne s’en plaindra pas donc, la dénonciation de fait à grands coups d’éclats de rire.
Le drame humain en devient une comédie dénonciatrice dérangeante à plus d’un titre.
Surprendre, déranger, étonner n’est ce pas aussi pousser à la réflexion ?

Spectacle vu le 22-09-2009
Lieu : Théâtre de Poche

Une critique signée Muriel Hublet

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