Complexe, complet, soigneusement étayé historiquement, le texte de Joëlle Gardes retrace les étapes d’une vie, mais surtout se révèle être un petit bijou finement ciselé de sentiments et de passions qui se dévoilent, se déroulent et s’enroulent à un rythme qui ne laisse guère le spectateur en repos.
Du ton de la confidence à celui de l’aveu, de la rancune contre Molière à sa rage contre les Tartuffes de son monde, Madeleine est un tout, vit et vibre, résonne et reflète.
On peut sans crainte la comparer à une flamme rousse lumineuse qui se dresse bien droite, avant de ployer sous un coup de vent, de se redresser de suite, de pâlir légèrement, pour redevenir chatoyante l’instant suivant.
La pièce est à cette image, fluctuante, nerveuse, chaleureuse et flamboyante.
Dans la bouche de son personnage, Joëlle Gardes glisse, par-ci par-là, des citations (extraites de classiques notoires) ou quelques rimes de son cru.
Tout coule de source, rien ne fait affecté ou trop apprêté.
La mise en scène a été confiée à Patrick Kerbrat.
Il a opté pour la simplicité et si quelques grands gestes, quelques emphases tragiques surviennent de-ci de-là, ce n’est que pour souligner avec justesse le côté tragédienne de la Béjart.
Dans le même respect de la pureté et de la beauté du manuscrit, la scénographie d’Édouard Laug est simple, presque minimaliste pour donner toute la place à l’essentiel … l’émotion.
Celle-ci est vraiment au centre de tout, grâce à la formidable prestation de Frédérique Tirmont qui pianote avec sur le clavier des sentiments, pianissimo, allegro, forte, mezzo, la mélodie est là, fascinante, attachante, poignante, enjouée, langoureuse toujours présente et ne vous laisse pas un instant en répit.
La Molière (publié sous le titre Madeleine B. ou la Lune rousse - Éd. de l'Amandier) se révèle être un petit régal pour les amateurs de mots forts et prenants, une plongée dans l’intimité tourmentée d’une femme aux multiples facettes, au destin illustre et tragique, la mise à nu d’une âme forte et blessée.
A découvrir avec le cœur, sans crainte d’une prise de tête.
Spectacle vu le 15-08-2008
Lieu :
Festival Royal de Spa (Salon Gris)
Une critique signée
Muriel Hublet
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