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Robespierre
RobespierreLa révolution française s’est abattue tel un couperet sur le pays et a laissé en son sein une plaie béante aux bords déchiquetés et baignés dans un flot de sang.
Le décor imaginé par Vincent Lemaire personnifie cela à merveille, on lui reprochera peut-être d’user à nouveau de trappes et de planchers inclinés qui semblent décidément être la signature du scénographe.

Personnalité trouble d’une époque confuse, en proie à la peur, à la terreur et à la frénésie, Robespierre a marqué de son empreinte philosophique et sanglante son époque.
A l’occasion des 250 ans de sa naissance, l’auteur Thierry Debroux signe un texte (et la mise en scène) surprenant, attachant presque, empli de phrases fortes, porteuses de signification, prémonitoires ou politiquement très lucides.
Il crée une atmosphère presque intemporelle pour son héros controversé, pour un homme solitaire, épuisé, tourmenté et … visionnaire.
Il nous montre l’image désabusée d’un démocrate avant la lettre, paranoïaque en diable, talentueux maître à penser, blanchi sous le harnais des responsabilités, à la vue déformée par les mesquineries et convoitises humaines.  

Thierry Debroux situe l’action dans les derniers moments de la vie de Robespierre, là où il est déjà presque perdu, renfermé, isolé et introspectif.  Il en fait une Arlésienne tout au long du premier acte, une ombre oppressante, vautour des uns, icône des autres.
L’auteur belge met en place ses personnages un peu comme des pions sur un échiquier et fait de Philippe Résimont  (dans le rôle de Desfieux) une maléfique âme damnée, torturant à plaisir son entourage.  Une occasion pour le comédien de sortir des rôles plus simples et humoristiques qu’on lui a connu ces derniers temps et de nous remontrer (si cela était nécessaire) que la tragédie lui convient aussi très bien.Robespierre
La complexité de l’histoire fait appel à des personnages récurrents, sortes d’intermèdes savoureux, avec Pierre Poucet  et Gérald Wauthia en duo comique et Bram Brasseur et Pierange Buondelmonte  en sans-culottes et spadassins des basses-œuvres de Desfieux.
Le deuxième acte verra surgir les explications, mais aussi signera l’apparition fougueuse d’un Robespierre tourmenté au discours pointu (très juste et ardent Paul Camus).
Visuellement impeccable avec des jeux de lumières performants (Marc EEman), quelques accessoires étonnant telle l’omniprésente guillotine, le tableau de Marat assassiné en toile de fond, la musique tout à la fois lancinante et décadente à la fois de Pascal Charpentier et les costumes originaux, mêlant le classicisme d’une époque à la violence des circonstances (Catherine Somers), Robespierre séduit et surprend tout à la fois.
On y déplorera l’impression de rigidité distanciée et formatée de certaines scènes (en première partie) pour en apprécier toute la richesse verbale (qui nécessitera pour en percevoir toutes les subtilités une lecture séparée (livre en vente à l’entrée du théâtre).Robespierre
Derrière les prestations marquantes de Philippe Résimont  et Paul Camus, il faut souligner en Michel Israël  le savoureux perruquier, gothique et paumée  Éléonore Duplay (Déborah Rouach), le père éploré et ami de toujours signé Jean-Paul Dermont  (en Mr Duplay), Muriel Jacobs dans une trop brève, mais juste apparition en Claire Lacombe, Perrine Delers en Amélie Verjus la prostituée au grand cœur et à la voix cassée et l’apparition figurative, mais prenante de Cyril Marbaix et Jules Noël  (en alternance) en Robespierre enfant, traumatisé par la mort de ses parents.
Une création mondiale qui malgré les petites remarques précitées séduit et nous renvoie brillement à nos propres incertitudes et désillusions.
Une représentation plus qu’intéressante et envoûtante du mythique et controversé Robespierre, évoqué avec pudeur, force, sobriété et conviction par la petite troupe choisie avec soin par Thierry Debroux.

A ne pas rater !

Spectacle vu le 22-02-2008
Lieu : Théâtre Royal du Parc

Une critique signée Muriel Hublet

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