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Le peuple sans nom ou la colère du fleuve
L’éChine courbée ou l’immuable destin
Un petit village de Chine, où les hommes (et surtout les Le Peuple Sans Nom ou La colère du fleuve femmes) ne sont que des anonymes, des êtres taillables et corvéables à merci, exploités par des dirigeants qui ne voient que rentabilité et profit et pour qui une vie a bien peu de valeur.
Quel est le nom de cette bourgade peu importe, l’auteur, Layla Nabulsi, a choisi d’évoquer le grand fleuve Yang-tseu-Kiang (également appelé Yangtsé) et ses crues mémorables.
Derrière un fait climatologique récurent, ses innombrables victimes et ses exodes forcés, Layla Nabulsi imagine (ou subodore ?) que pour éviter à une grosse agglomération d’être noyée, le gouvernement détruise volontairement des digues.
Pire même, il inonde les campagnes, sans en évacuer les paysans, afin de pouvoir ensuite y transplanter l’excédent de population des villes.
Un postulat qui ne dérangera guère les esprits cartésiens quand on se souvient qu’il y a quelques mois les autorités chinoises dans un souci de paraître, à l’occasion des Jeux Olympiques, ont expulsé manu militari certains des indésirables et peu représentatifs habitants de Pékin.

Pas de misérabilisme ou de pathos pourtant dans ce récit diablement enlevé où six actrices s’échangent les rôles, dans des mouvements drolatiques savamment orchestrés.
Pas de décors pompeux ou de stricte rigueur, tout est fait devant le public avec quelques accessoires et beaucoup d’imagination.
Le Peuple Sans Nom doit beaucoup à ses comédiennes (Marie Bach, Yamina Cheurfa, Jo Deseure, Catherine Salée, Cachou Kirsch et Sophia Leboutte) qui nous offrent une mise en musique sans fausses notes de la partition imaginative de son auteur-metteuse en scène Layla Nabulsi.
Entre farce burlesque et conte déroutant le spectacle séduit et amuse tant dans le jeu théâtral au trait parfois volontairement grossi, que dans des postures caricaturales, mais aussi et surtout dans la profondeur attristée du regard d’Eté la petite, ceLe Peuple Sans Nom ou La colère du fleuve tte enfant ballottée par le fleuve et la vie qui va subir deuil, viol, être exportée comme un ballot de viande avant de tomber dans un réseau de prostitution.

Cette fable dramatique mélange à la poésie un petit côté exagéré et grinçant, juste pour titiller les consciences sur les thèmes abordés par la pièce (libre arbitre de la femme, prostitution, condition humaine, politique, religion, ..).
Varié, ce spectacle original, dans sa présentation, et haut en couleur, se compose d’une vingtaine de tableaux.
Rassembleur et tout à la fois interrogatif, il plaira à tous les publics et mériterait même une tournée dans les écoles où il se révélerait un tremplin idéal pour les enseignants à la veille de parler à leurs élèves des droits de l’homme.

Spectacle vu le 04-09-2008
Lieu : Théâtre Le Public - Voûtes

Une critique signée Muriel Hublet

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