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La Forêt
La Forêt - Théâtre NationalQui du tragédien ou du comédien est le plus menteur ?
Telle est la question que pose Alexandre Ostrovski, un auteur russe peu connu chez nous, dans La forêt.
Deux acteurs de théâtre quasi vaincus par la misère et la méconnaissance de leur art se rendent chez la tante de l’un d’eux.
La dame est riche et ignore la vie réelle de son neveu.
Les deux larrons vont donc lui mentir (un peu) mais est-ce le pire des mensonges dans ce microcosme d’une société où chacun ment et pas pour des raisons louables.
Arrivisme, avarice, cupidité, flagornerie, chacun a ses raisons pour travestir allègrement la vérité.
Mais à force de tout déguiser, cela va tourner en carnaval jusqu’au moment où comme il se doit les masques devront tomber.  Qui se cache derrière le faux vernis policé ? De bons bourgeois ? Une notable compatissante ? Des acteurs profiteurs ?
Une comédie qui croque allégrement la société de jadis, pourtant guère différente de la nôtre.
Le phrasé est un peu lourd et parfois alambiqué, mais le sujet est plaisant.
Il reste, hélas, la longueur de pièce (3h20 entracte compris), la première partie est la mise en place des personnages et finit par rebuter certains spectateurs qui ne reviennent pas en salle pour profiter de la seconde partie plus débridée et plus amusante avec son final, ses retournements de situation et son épilogue.
Philippe Sireuil donne à la pièce un rythme vif et plutôt sportif. Sur une scène en pente, les acteurs vont et viennent, courent et glissent, roulent et dansent, se glissent sous les tréteaux, escaladent le plateau.  Un exploit quasi athlétique, mais uneLa Forêt - Théâtre National scénographie et une mise en scène qui ne sont pas sans rappeler furieusement Mesure pour Mesure avec le même metteur en scène et aussi au National.
Mais mis à part le bémol de la longueur et un petit problème de compréhension du texte par moment, La forêt est un spectacle réussi.
Drôle, ironique, incisif, mais pas dénué de sensibilité, le spectacle nous entraîne à la découverte de nous-mêmes derrière nos mensonges (qu’ils soient pieux ou pas). 
Le duo d’acteurs malchanceux est joué par   Philippe Jeusette, inénarrable, mais superbe dans le rôle du neveu et Fabrice Schillaci qui est tout à la fois collègue, ami et un Sganarelle que ne désavouerait pas Mr Molière. 
François Beukelaers est savoureux dans son rôle de valet, calme et pondéré, engoncé dans une rigide tenue qui ne l’empêche pas d’être clairvoyant et acerbe.
Janine Godinas est une servante au franc-parler et à la libre-pensée, si son rôle n’est pas très grand dans cette pièce, la prestance et le talent de cette grande dame suffisent à remplir les planches.
Difficile de ne pas les citer tous, car aucun ne démérite, mais la liste serait longue.

La forêt d’Ostrovski vue par Philippe Sireuil est un spectacle majestueux, un chêne fier et droit dans un sous-bois de vilenies et de mensonges.La Forêt - Théâtre National

Plébiscité Prix de la critique 2006-2007 comme Meilleure mise en scène

Prix de la critique 2006-2007 comme  Meilleure création artistique et technique décerné à Catherine Somers

Spectacle vu le 12-12-2006
Lieu : Théâtre National - Grande Salle

Une critique signée Muriel Hublet

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