On ne peut pas savoir ce que ça peut gueuler un lapin
Un amour qui brave les lois de Dieu et des hommes.
Une liaison scandaleuse, contre nature.
De quoi indigner, révolter ou scandaliser ?
Dans On ne peut pas savoir ce que ça peut gueuler un lapin on est bien loin de tout cela.
Si le sujet est scabreux, brûlant, dérangeant, les mots de François Champdeblés sont pudiques, sobres et très poétiques.
En rien, le texte ne choque. Si les choses sont appelées bien clairement par leur nom, cela n’est pas un étalage de vulgarité, loin de là même.
Thiebault Vanden Steen raconte l’éclosion de son amour, sa croissance et sa mort avec tant de douceur, de tendresse et de naturel que rien ne peut nous heurter (ou en tout les cas ne cherche à nous blesser).
Ses paroles sont empreintes d’un tel romantisme, d’une telle tendresse, d’une telle force de sentiment qu’on en oublie qui il aime, que cela semble presque naturel, normal et magnifique.
En face de lui Arthème, auteur ou romancier qui a été témoin de cet amour et s’interroge sur ses tenants et aboutissants.
Homme perturbé, mal dans sa peau, il est empli de regrets.
Il refoule ses non-dits, ses envies, ses remords.
Son malaise, il essaie de le diluer, de le comprendre grâce à la vie des autres.
Il cherche à se comprendre, à supporter ses refus et leurs conséquences, il regrette ses acceptations refoulées.
On ne peut pas savoir ce que ça peut gueuler un lapin crée des ambiances multiples.
De l’angoissant début, pesant, lourd qui joue sur le questionnement et l’angoisse de l’auteur (Arthème) et les secrets cachés de Félicien (Thiebault Vanden Steen), on essaie de se situer, de saisir les sous-entendus pour se trouver emporter, soulever par la force de la bourrasque des sentiments, pour flotter dans un ciel de poésie et pour atterrir un peu brutalement dans une réalité qui reste toujours un peu glauque, mais qui finalement n’est qu’une question d’ambiance et de tournure d’esprit.
La pièce peut paraître sombre, mais pas du tout.
Derrière la poésie et l’amour, se cache aussi pas mal d’humour.
Une ironie caustique, une autodérision qui sont un peu comme un souffle salvateur dans des moments parfois très prenants.
Une pièce à voir librement, les oreilles ouvertes au lyrisme des mots, l’esprit sans entraves moralistes, l’œil ravi par la prestation des acteurs.
Spectacle vu le 01-08-2006
Lieu :
Jardin de ma Sœur
Une critique signée
Muriel Hublet
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