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La dispute
La DisputeMarivaux en mode voyeur ?

Loin des marivaudages habituels, l’auteur français se plonge sur les errances du cœur et surtout sur les coupables de ceux-ci.
Qui de l’homme ou de la femme est le premier à trahir ?
Pour répondre à cette épineuse interrogation et sous la forme d’un conte philosophique Marivaux imagine une expérience cruelle : isoler dès la naissance 4 enfants.
Élevés sans aucun contact avec le monde extérieur, mis à part leurs gardiens-précepteurs, ils seront, à dix-huit ans, confrontés brutalement les uns aux autres et leurs réactions soigneusement étudiées.

C’est bien là, à très peu de choses près, le principe des émissions de télé-réalité : des personnages scrutés, épiés, confessés et manipulés par des observateurs pas toujours bienveillants, plus soucieux de leur propre plaisir qu’animés de bonnes intentions.
C’est sous cet angle qu’Emmanuel Dekoninck adapte et met en scène sa vision (un tantinet parodique) de cette comédie.

Le Prince (un Sébastien Hébrant férocement halluciné) prend ainsi l’aspect d’un dictateur pervers et démentiel qui effraye même Hermiane (Sophia Geoffroy) son amie de cœur, représentée ici quasi comme une call-girl de luxe.
Eglé (Sarah Lefèvre), Azor (Quentin Minon), Adine (pétillante et mutine Camille Dawlat) et Mesrin (Damien De Dobbeleer) sont les pantins de ce diabolique mentor.La Dispute
Au-delà de leurs compréhensibles hésitations, de leurs timides balbutiements et de leur comportement logiquement emprunté face à tant de découvertes dans leur nouvel univers, Emmanuel Dekoninck leur a demandé un jeu, par instants, franchement saccadé, voire caricaturé, comme pour mieux encore amplifier l’impression de voir s’agiter des êtres manipulés par des ficelles.
Seuls Carise (Marie-Noëlle Hébrant) et Mesrou (Geoffrey Seron) se montreront naturels, bienveillants et protecteurs.

Bien loin d’un Marivaux ‘classique’, La dispute se révèle une pièce complexe, surprenante, voire même dérangeante.
Tous n’adhéreront pas à cette vision toute en contrastes, mélange de sensualité, de pudeur, d’humour et de férocité. Mais l’originalité et la fraîcheur énergique du spectacle, alliées à l’engagement et au dynamisme des comédiens rendent l’ensemble plaisant.
Une agréable et piquante découverte pour les esprits curieux.

Spectacle vu le 15-10-2015
Lieu : Atelier 210

Une critique signée Muriel Hublet

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