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L'homme du hasard
L'homme du hasardUn train roule vers Frankfort.
Un wagon.
Un homme et une femme seuls dans le compartiment.
De cette situation banale, de cet enfermement forcé dans un lieu d’où on ne peut s’échapper, l’auteur Yasmina Reza a imaginé un moment de théâtre intimiste.
Dans le silence, uniquement battu en brèche par les roulements métalliques, les pensées bourdonnent et s’agitent frénétiquement.

Lui, est un écrivain de renom.
Tel un ours bourru qui ressasse ses déboires, il évoque amèrement son prochain livre, la critique imbécile, les femmes qu’il a connues, sa fille qui va se marier, son gendre qu’il n’apprécie pas.
Il se sent en total décalage, un peu comme le capitaine d’un navire perdu sur la Mer des Tempêtes.

Solitaire, Elle porte dans le cœur le souvenir de son ami récemment décédé.
A-t-elle jamais vraiment aimé d’ailleurs ?
Anonyme, elle est une de ses inconditionnelles lectrices.
Hasard du destin, elle a même, glissé dans son sac, un de ses romans.L'homme du hasard
Osera-t-elle le sortir, commencer à le lire devant lui ou mieux entamer la conversation ?

Juxtaposition de deux monologues intérieurs, L’Homme du hasard bénéficie d’une mise en scène intéressante.
Bruno Emsens, dans une scénographie de Valentin Périlleux, dédouble le lieu et évite ainsi l’écueil d’un spectacle sans action réelle.
À l’arrière-plan, le wagon, habité par deux poupées.
Dans l’espace de jeu, deux banquettes amovibles où Elle et Lui égrèneront tour à tour leurs ruminements ou leurs rêveries.

Face à face, Jo Deseure et Christian Crahay donnent corps à ces deux personnages happés par l’urgence du temps qui passe.
Ils n’ont qu’un court trajet pour, qui sait, changer le cours de leurs vies.
Efficace en bougon aigri, Christian Crahay accentue, si cela était nécessaire, la flamme vive, l’ardent brasier qu’est Jo Deseure.
Chatoyante et flamboyante, l’actrice irradie d’une présence incroyable et vaudrait rien que par sa seule prestation la découverte de cette parenthèse intemporelle qu’est L’Homme du hasard.

Spectacle vu le 21-10-2015
Lieu : Le Boson

Une critique signée Muriel Hublet

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