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Ecris que tu m’embrasses
Femme de papier, amour de chair
Ecris que tu m’embrasses   Pour ne pas aller au front, Simon se transforme en cousine Josée.
Pour créer l’illusion, le catalogue de La Redoute a fourni bas, tailleur, soutien-gorge préformé et gaine renforcée.
À l’arrière, loin des combats, la nouvelle venue se glisse parmi les épouses esseulées qui diluent leur chagrin dans le café et la mirabelle.
La rage de voir partir leur homme à la guerre, les griefs et rancunes contre la main légère de ces derniers, le manque de sexe, la solitude forcée trouvent leur exutoire dans le besoin de se sentir utile, d’être, par courrier interposé, un havre rassurant pour les pensées des soldats dans leurs tranchées.
Chacune correspond avec son mari.  Mieux même, elles convainquent Josée/Simon de faire de même.  Elle devient donc le soutien moral de Thomas, jeune homme célibataire.

Dans cet échange épistolaire, Josée succombe aux phrases tendres de Thomas, le jeu du début se change en confidences réelles, les mots de papier se métamorphosent en sentiments bien tangibles.
Les coeurs se dévoilent et dans cette mise à nu de l’âme, le sexe de Simon/Josée se mue en chimère.
Petit à petit, l’amour prend toute la place, efface tout.
Même la véritable identité de Simon/Josée ?
Ecris que tu m’embrasses
Virginie Thirion (Manon - 45 kg - 7000 m², Rentrez vos poules) nous offre à nouveau un texte subtil, pudique, profond.
Elle marie la douceur du propos à la puissance dévastatrice des émotions, elle unit la tendresse et l’humour dans une mise en scène originale.
Des fenêtres nous permettent d’apercevoir l’intérieur de la maison de Simon/Josée.
La plus grande devient même, à l’occasion, écran pour laisser apparaître les voisines. Virginie Thirion joue habilement sur ce recul, sur ce fin voile entre le public et l’acteur Christophe Herrada pour mieux mettre en relief l’emprise et le panel des sentiments qui remue ce cœur délicat et sensible.
Ce dernier nous offre une interprétation subtile de cette dualité homme/femme sans jamais tomber dans le cliché.
Chaque geste, chaque élément de sa tenue, chaque touche de maquillage tout a été soigneusement étudié, soupesé pour générer l’illusion la plus parfaite possible.
Le comédien passe d’un rôle à l’autre, d’une intériorité à l’autre sans sourciller.
Assumant avec brio le trouble, la sensibilité, la dualité, le conflit intérieur qui taraudent Josée/Simon et les sensibles envolées lyriques, épistolaires et amoureuses de Thomas, il peine un peu à rendre avec le même brio certaines des paroles des voisines.
Mais finalement n’est-ce pas un peu trop demander à Christophe Herrada d’exceller dans chacun des personnages interprétés.

Ne boudons donc pas notre plaisir.
Cette ode à l’amour, à la vie et à l’espoir se déguste tout simplement, comme un bon café : chaud, fort, corsé saupoudré d’un soupçon de sucre pour en atténuer la suave amertume.

Spectacle vu le 21-01-2009
Lieu : Théâtre Varia - Grande Salle

Une critique signée Muriel Hublet

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